À cette époque marquée par les troubles causés par les guerres, les épidémies et un relâchement général des mœurs, le protestantisme posait un problème sérieux. Les catholiques de Metz, constatant que ni la force ni la persuasion n'avaient pu empêcher les protestants de croître en nombre et de gagner le droit de pratiquer leur culte librement, saisirent l'opportunité du passage de François II à Reims en 1559 pour lui demander la permission de fonder un collège à Metz. Ce projet devait évidemment être financé par les communautés ecclésiastiques, les abbayes et la municipalité.
Une fois leur requête acceptée, ils envoyèrent deux représentants, Michel Praillon, maître échevin, et Claude Dabocourt, au cardinal de Lorraine, qui administrait encore les biens temporels de l'évêché. L'archevêque et les délégués décidèrent d'établir le futur collège dans la Cour d'Orne, qui deviendra plus tard la Maison de la Trinité. Cependant, l'exécution de ce projet fut reportée au prochain voyage du prélat à Metz.
Sous le règne de Charles IX, un édit fut proclamé, interdisant l'exercice du culte protestant dans la ville de Metz et dans tout le pays. Par cet édit, le roi ordonna également la démolition d'un temple récemment érigé dans les fortifications de Metz. Cependant, peu de temps après, cédant aux pressions des instances protestantes, il accorda la permission de célébrer les baptêmes et les mariages à Courcelles.
Pour atténuer l'effet de cette concession que le roi venait d'accorder, le cardinal de Lorraine, également nommé Charles et surnommé à l'époque « le Cardinal de Guise », envoya en mission plusieurs savants ecclésiastiques à Metz. Il décida également de réaliser un projet attendu depuis dix ans : la fondation d'un collège. Ce projet, il souhaita le confier aux Jésuites, dont il était le protecteur et l'ami, car ces derniers étaient profondément attachés au siège apostolique, c'est-à-dire à la papauté. Les Jésuites étaient les plus ardents adversaires de Martin Luther et de Jean Calvin, les initiateurs de la Réforme protestante. Cela offrait au cardinal une garantie précieuse : celle de la fidélité indéfectible des Jésuites à la foi catholique et de leur lutte fervente contre l'hérésie.
Le cardinal de Lorraine envoya en mission le Père Edmond Auger, un Jésuite, à Metz pour le Carême de 1571 et informa son cousin, le duc Charles III, de son projet. Il demanda à son cousin de fonder le collège en Lorraine plutôt qu'en France, afin de soustraire la Lorraine à l'influence française. Cette requête ne dérangea pas le cardinal, qui était entièrement d'accord avec son cousin Charles. Après un certain temps de recherches, les deux hommes trouvèrent l'endroit idéal pour l’établissement du collège et jetèrent leur dévolu sur la ville de Pont-à-Mousson. Parmi toutes les villes de Lorraine, Pont-à-Mousson offrait le plus d'avantages : située entre les diocèses de Metz et de Toul, à égale distance des deux villes épiscopales et de la capitale des duchés, Nancy, tout en étant en relation avec Saint-Mihiel, dont elle relevait du bailliage et appartenait au Barrois.
Pont-à-Mousson garantissait un cadre de paix, de sérénité et de tranquillité pour les futurs étudiants, grâce à son fleuve qui mêlait la fraîcheur de ses eaux à la chaleur estivale. Entourée de champs et de vignobles fertiles, la ville était nichée au milieu d'une vallée ravissante, couronnée de forêts offrant aux promeneurs d'agréables excursions. À l’époque, c'était une petite bourgade encore obscure, dont la partie la plus ancienne, bâtie sur la rive droite de la Moselle dans le diocèse de Metz, formait la paroisse de Saint-Martin après le déplacement au XIIIe siècle du village de Thirey (dont le nom a donné Trey après suppression du "i"). Cette partie possédait la commanderie et la magnifique église des Antonistes. La partie plus récente, sur la rive gauche de la rivière, était du diocèse de Toul et se divisait en trois paroisses : Saint-Laurent, la principale, Sainte-Croix-en-Rupt et Saint-Jean. On y trouvait également la collégiale Sainte-Croix, à l'entrée gauche du pont, fondée au XIIIe siècle par Thiébaut Ier, comte de Bar ; le couvent des Clarisses, commencé en 1441 par Charles II et achevé par René Ier en 1444, illustré par la vie sainte et la bienheureuse mort de la duchesse Philippe de Gueldre ; l'hôpital Notre-Dame, dirigé par les religieux de Saint-Antoine ; et un autre hospice tenu par quatre religieux de Saint-Lazare. Enfin, à l'extrémité nord de la ville, à la jonction du mur d'enceinte avec la Moselle, se dressait le château, construit probablement au temps de René II.
La petite ville allait bientôt connaître une augmentation de sa population, de son aisance et de sa renommée. En janvier 1572, l’archevêque de Reims, en visite à Blois, rencontra François de Borgia, général de la Compagnie de Jésus, qui, sur ordre du pape Pie V, accompagnait le cardinal Alexandrini dans ses diverses légations. Il put discuter avec lui de son projet de création d’un collège à Pont-à-Mousson. Le général accueillit le projet avec enthousiasme, mais ne prit aucun engagement, car les offres étaient nombreuses et le nombre de sujets restreint. Le pape Pie V mourut le 1er mai, et le cardinal de Lorraine fut appelé au conclave, poursuivant ses négociations à Rome. Il présenta au nouveau pape Grégoire XIII, entre autres projets, la création d’une université à Pont-à-Mousson et la transformation en bien laïc de l'abbaye de Gorze, qu'il gérait temporairement. Le pape prit en considération ces projets et fut informé que les Jésuites étaient très riches, car tous les bénéfices passaient par leurs mains. Cependant, peu de temps après, le pape changea d’avis et encouragea le cardinal à persévérer dans son entreprise.
Charles soumit au pape, pour lui-même ainsi que pour son cousin, une requête détaillant ses intentions et ses projets. Cette requête exposait avec minutie son dessein d'endiguer les avancées du protestantisme. Il était convaincu que le moyen le plus sûr et le plus efficace de parvenir à cet objectif résidait dans l'établissement, en tous lieux, de collèges composés de savants éclairés. Ces derniers, imprégnés de la doctrine sainte, seraient chargés d'inculquer à leurs concitoyens le dogme et la morale catholiques. Il demandait donc la création à Pont-à-Mousson d'une université où se tiendraient des cours de théologie, de droit, de médecine et de philosophie. Il demandait la construction d'un collège religieux jésuite. Ce collège serait établi dans la commanderie des Antonistes, dont l'église, le couvent, les jardins et les dépendances seraient transférés aux Jésuites. On pourvoirait à l'entretien des religieux, qui enseigneraient par une rente de 1500 écus d'or (environ 450 000 € aujourd'hui) sur les ressources financières détenues par les communautés religieuses. Une autre rente de 1500 écus d'or serait prélevée pour un tiers sur les revenus épiscopaux de Metz, dont le cardinal était administrateur, et les deux autres tiers sur les abbayes et prieurés des trois évêchés. L'évêque de Metz ainsi que les abbés et prieurés des trois évêchés pourraient se décharger de cette responsabilité en cédant aux Jésuites des bénéfices mineurs qu'ils ont la capacité de distribuer, jusqu'à concurrence du montant de la rente demandée.
En échange de ce financement, les Jésuites s’engagent à établir un collège d’envergure équivalente à ceux qu’ils ont créés auprès des plus prestigieuses universités. Ils fourniront soixante-dix religieux, comprenant quatre professeurs de théologie, trois de philosophie, un de rhétorique, un d’humanités, et trois de grammaire. Chaque jour, le collège proposera deux cours de grec, un cours d’hébreu, et un cours de mathématiques. L’université comprendra cinq facultés : celles de théologie et de philosophie seront confiées aux Jésuites et administrées selon leurs règles, tandis que les facultés de droit canon, de droit civil et de médecine seront dirigées par des séculiers, sous la direction des doyens, conformément aux traditions des universités de Paris et de Bologne.
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